NOT another Beauty Blog

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1000 nuances de peau

Mais pourquoi donc ma peau est-elle blanche, la tienne mate, la tienne ambrée, la tienne noire..? En voilà une bonne question ! La couleur de la peau est un héritage de nos ancêtres. Non pas votre Papi adoré, ni même nos ancêtres les Gaulois, mais bien les premiers Homo sapiens, les hommes de Néanderthal et tout ce joli monde... Je vous explique ?

 

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Pour vous raconter l'histoire de notre peau, je vais (très fortement !) m'inspirer de la pointure en la matière : l'anthropologue et paléobiologiste américaine Nina Jablonski qui, avec son mari George Chaplin, a conduit des travaux qui ont chamboulé notre vision de la couleur de la peau (1). Et occasionnellement nous mettent face à la preuve irréfutable de l'évolution par la sélection naturelle, chère à Charles Darwin.

 

Pour comprendre l'évolution de la pigmentation cutanée, il faut tout d'abord se pencher sur l'exposition solaire de la Terre. Comme le montre l'image ci-dessous, issue des données récoltées par le satellite Toms7 de la Nasa, l'Afrique équatoriale, berceau de l'Humanité, fait partie des zones les plus massivement bombardées d'ultraviolets (UV). À noter aussi, la plus grande partie habitable de l'hémisphère nord se trouve dans les zones recevant le moins d'UV.

 

Irradiation UV annuelle moyenne à la surface de la Terre, mesurée par le satellite Toms7 de la NASA

 

À l'origine, une peau foncée fruit de l'évolution

Tout commence donc en Afrique équatoriale. Pour survivre dans les conditions climatiques extrêmes qui règnent sous ces latitudes, les premiers ancêtres de l'Homme ont peu à peu perdu leurs poils (cf. image ci-dessous) et allongé leur silhouette, le tout dans un souci de thermorégulation optimale (2)

 

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On notera que la seule partie de notre corps encore massivement poilue (et dont la peau est, en conséquence, très blanche) est la tête. C'est bien normal, puisque, du fait de la bipédie, c'est elle qui est la plus exposée au soleil. "Les changements de pigmentation cutanée ont accompagné la perte des poils, précise Nina Jablonski, et plusieurs éléments de preuve indiquent qu'une pigmentation permanente et foncée, à base d'eumélanine (cf. encadré ci-dessous), est apparue peu après l'émergence du genre Homo en Afrique".

 

Mélanine, superstar
La mélanine est un pigment "très ancien et répandu dans tout le règne animal, à l'origine, par exemple, de la couleur de l'encre des seiches", explique Alain Froment, docteur en médecine et en anthropologie biologique, et co-auteur du livre Le Soleil dans la Peau (2). "Elle a des propriétés antioxydantes, [...] c'est aussi la structure moléculaire la plus performante pour absorber les sons, ce qui explique peut-être sa présence dans l'oreille interne. [...] Dans la peau humaine, elle est fabriquée [...] sous deux formes, eumélanine, foncée, et phéomélanine, jaunâtre. [...] Il existe aussi une neuromélanine dans le cerveau, qui donne sa couleur notamment au corps strié et à la substantia nigra, et dont la fonction est mal connue. [...] La présence de mélanine dans les organes profonds comme le péritoine, ou dans l'épiderme d'animaux nocturnes, suggère que son rôle est loin de se limiter à un filtre à ultraviolets".                    

 

Mais pourquoi ce besoin de protection solaire naturelle qu'est la mélanine ? Pour protéger l'acide folique de la dégradation qu'il subit sous l'effet des UV (je reviendrai plus précisément sur ce sujet et les autres effets du soleil sur la peau dans mon prochain article), et particulièrement les UVA, massivement présents proche de l'équateur. L'acide folique et ses dérivés, les folates, sont essentiels dans la division cellulaire, la synthèse et la réparation de l'ADN, ainsi que la mélanogénèse (la production de mélanine : tout se rejoint !). De plus, ils ont une importance particulière au niveau des tubes séminifères et du développement de l'embryon. Selon les termes de Nina Jablonski, "maintenir l'intégrité du métabolisme des folates revêt donc un caractère primordial d'un point de vue de l'évolution, puisqu'elle affecte le succès reproductif et la survie dans les premiers temps de la vie". 

Selon Alain Froment, la couleur de peau des premiers Hommes n'était "probablement pas trop foncée ; en effet, dans la mesure où le chasseur-cueilleur est contraint à des déplacements incessants, sa couleur optimale doit être un compromis entre la protection contre les brûlures solaires et la limitation du stress thermique". En effet, la couleur noire absorbe la chaleur solaire.

 

 

 L'éclaircissement de la peau, conséquence des migrations

Les premiers représentants du genre Homo avaient donc une peau foncée, d'une teinte probablement proche de celle des inuits. Mais, il y a 1,9 millions d'années, les Homininés (genres Australopithecus et Homo) ont commencé à sortir d'Afrique. Et donc à passer d'un environnement massivement irradié par des UV à des zones où ce rayonnement UV est moins intense et plus variable, notamment dans ses proportions UVA/UVB. En effet, "au nord et au sud de la latitude 46° environ, les niveaux d'UVB sont insuffisants, la majeur partie de l'année, pour initier la production cutanée de la pré-vitamine D3", indiquent Nina Jablonski et George Chaplin dans leurs travaux. Or les UVB sont nécessaires à la production de vitamine D3 (qui est en fait une hormone, puisqu'elle est synthétisée par le corps humain). 

La vitamine D intervient dans la régulation de nombreux processus biologiques : métabolisme osseux, immunité innée, prolifération et différenciation cellulaire, fonctionnement normal du pancréas, du cerveau et du cœur. Contrairement aux folates, l'impact sur la reproduction (c'est-à-dire le point de sélection naturelle) n'intervient pas directement, et provient majoritairement des déficits en vitamine D3 d'origine alimentaire. Cependant, les personnes carencées par les effets des UV seront plus susceptibles aux infections virales et bactériennes, et aux maladies auto-immunes telles que la sclérose en plaques et le diabète de Type 1. Pour Nina Jablonski, "sous des latitudes moins irradiées en UV, la pression de sélection naturelle était forte pour perdre la pigmentation constitutive, afin de permettre une production continue de vitamine D". Les peaux se sont donc plus ou moins dépigmentées selon la quantité de rayonnement UV dans la zone habitée (cf. image ci-dessous). 

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Un arc-en-ciel de couleurs de peau

La myriade de couleurs de peau que l'on peut voir aujourd'hui est donc le résultat de l'évolution que notre espèce a choisi pour faire face à la sélection naturelle. Ces différentes carnations se retrouvent dans ce que l'on appelle le phototype, une classification médicale des peaux en fonction de leur réaction au soleil. Il existe 6 phototypes, qui sont définis par la couleur de la peau et des cheveux, et la présence ou non de taches de rousseur (cf. tableau ci-dessous). On peut ajouter un "septième phototype", correspondant à la peau des bébés et des personnes atteintes d'albinisme : leur peau ne bronze pas, mais subit systématiquement des coups de soleil. Voilà pourquoi il ne faut surtout pas exposer les enfants au soleil avant 3 ans !

  

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La mélanogénèse (fabrication de mélanine = bronzage), "confère naturellement, aux personnes de phototype III (la majorité des français) un facteur de protection solaire (FPS, le même que celui sur vos crèmes solaires) de 3 à 4 et, à celles de phototypes V et VI, un FPS de 7 à 8", précise François Aubin, dermatologue au CHU de Besançon. Ce qui, soyons clair, n'est rien du tout, et ne se substitue en aucun cas à une protection solaire. Mais je reviendrai sur la protection solaire dans un prochain article.

De plus, cette catégorisation des différents phototypes n'est qu'un outil médical. Elle induit la notion de discontinuités qui n'existent pas dans la réalité. En effet, grâce aux différentes migrations de l'Homme et aux métissages entre les individus, "un merveilleux arc-en-ciel sépia caractérise aujourd'hui l'Humanité", comme le dit si bien Nina Jablonski. Un arc-en-ciel qui se visualise encore mieux à travers le projet Humanae de la photographe espagnole Angelica Dass. Débuté en avril 2012, ce projet se donne pour but de répertorier toutes les carnations possibles, en faisant correspondre plus de 2000 portraits de visages avec la couleur du système Pantone® qui s'en rapproche le plus. Et voilà ce que ça donne : 

 

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Je vous encourage vivement à aller passer un moment sur le site du projet Humanae, et d'admirer la beauté de la diversité humaine ! 

 

À très vite pour toujours plus d'explication sur les effets du soleil sur notre peau ;o)

 

Capucine Martin-Phipps

 

 

(1) Lors d'un TED talk qu'elle donna en Février 2009, Nina Jablonski explique en moins d'un quart d'heure l'origine des nuances de l'humanité ! Pour ceux qui veulent la version longue (et non sous-titrée, mais son anglais est très clair !), regardez aussi/plutôt celle-ci. Et quelques un des articles les plus connus du couple Jablonski-Chaplin, ici et ici.            retour article
(2)  L'explication complète de ces modifications peut être retrouvée dans le livre Le Soleil dans la Peau, co-écrit par Jean-Marc Bonnet-Bidaud (astrophysicien), Alain Froment (docteur en médecine et en anthropologie biologique), Patrick Moureaux (dermatologue) et Aymeric Petit (psychiatre-addictologue).            retour article /  retour encadré

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27/06/2014
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